lundi 9 août 2021

Une belle journée au Monastère Royal de Brou

Voilà un monument que je n'avais encore jamais visité . C'est à l'occasion de l'exposition "Valadon et ses contemporaines" que je me suis décidée à prendre la route pour Bourg en Bresse. J'avais opté pour une visite commentée de l'exposition et celle-ci a lieu seulement le mercredi à 10h00, la réservation se faisant en ligne sur le site internet.
Mais avant de parler de l'exposition, quelques mots sur le monastère que j'ai visité également (tant qu'à faire!!) le billet étant valable à la fois pour l'expo et la visite du site.

Le monastère de Brou est né de la volonté de Marguerite d'Autriche (1480-1530), édifié en hommage à son mari défunt Philibert le Beau.
Marguerite n'a pas eu la vie facile bien qu'elle soit fille d'empereur  (Maximilien 1er) et de duchesse (Marie de Bourgogne). 
Née à Bruxelles en 1480, elle a d'abord été fiancée à l'âge de 3 ans à Charles VIII, fils de Louis XI,  afin d'assurer l'alliance de la France et de la Bourgogne, le traité d'Arras de 1482 s'ensuivit. Charles VIII sera roi de France  à l'âge de 13 ans  en 1483.  Mais il répudia  Marguerite en 1491 quand il épousa pour des raisons politiques et d'alliances Anne de Bretagne, ce qui lui permis d'unir le duché de Bretagne au royaume de France.
Marguerite est donc restituée à son père en 1493 avec une grande partie de sa dot (encore heureux!!). Elle retourne aux Pays Bas en ayant une dent contre la France (on la comprend!). Son père la fiance avec l'infant d'Aragon Juan héritier des royaumes d'Aragon et de Castille (parallèlement il négocie le mariage de son fils Philippe avec la soeur de Juan, Jeanne de Castille).
Marguerite épouse donc Jean mais, manque de bol,  6 mois après, celui-ci décède. Au bout de 2 ans retour à la case départ : Bruxelles,  elle a 20 ans. Il faut donc retrouver un allié à la maison austro-bourguignone et c'est vers la Savoie que le père de Marguerite se tourne.
Son mariage avec Philibert II de Savoie (Philibert le Beau) est négocié et a lieu en 1501 et la Savoie rentre dans le fief de la maison des Habsbourg.   Ils s'installent à Pont d'Ain. Elle prend vite en main les affaires politiques savoyardes. Mais en 1504, Philibert meurt des suites d'un accident de chasse. Elle refusera de se marier à nouveau (cette fois là on lui destinait Henri VII Tudor)
La construction du monastère débute en 1506 et finit en 1512. Par la suite, l'église est édifiée de 1513 à 1532.
En 1506, à la mort de son frère elle s'en retourne aux Pays Bas pour s'occuper de son neveu (Charles Quint) et de ses  nièces. Elle devient la gouvernante des Pays Bas en 1507 et établit sa cour à Malines. Elle soutient son neveu  lorsqu'il brigue la couronne impériale en 1519 à la mort de Maximilien 1er, contre Francois 1er, fils de Louise de Savoie, soeur de Philibert.
Elle restera une femme de la Renaissance riche mécène et protectrice de la littérature, de la musique et des arts. Sa devise Fortune Infortune Fort Une met en avant ses malheurs causés par le sort et  endurés tout au long de sa vie. 
 Pour mieux situer Marguerite et sa lignée voici quelques éléments de généalogie:



En espérant n'avoir pas été trop ennuyeuse avec  cet aperçu historique, le lien avec l'exposition se fait dans la lignée de ce que fut Marguerite c'est à dire une  mécène des arts.
L'expo se découpe en plusieurs parties et dans la première est abordée le contexte historique. Les femmes artistes appartiennent soit à un milieu artistique au sein de leur famille soti à un milieu aisé qui leur permettent de pouvoir aller dans des écoles spécialisées privées. Elles peignent alors  ce qu'elles ont sous les yeux c'est à dire leur famille, leur quotidien.
Femme dans un jardin - Louise Abbéma vers 1900
La couturière- Suzanne Valadon -1914
Le salon officiel des arts ne leur est pas accessible facilement et pour remédier à cela la sculptrice Hélène Bertaux crée l'Union des Femmes Peintres et Sculpteurs en 1881.
Ce n'est qu'en 1897 qu'il leur est possible d'accéder aux Beaux Arts et en 1903 d'accéder au prix de Rome (qui fut fondé au 17ème siècle).
Jeune fille au bain ou Sarah la baigneuse- Hélène Bertaux vers 1873
En 1914, les femmes assureront les métiers des hommes alors au combat.
La chauffeuse de Tramway de Georges Achille Fould en 1914
La deuxième partie est consacrée à la peinture de Suzanne Valadon (1865-1938) et  la montre du statut de modèle à  l'artiste renommée  qu'elle a été et surtout elle la fait reconnaître comme artiste à part entière et non seulement en tant que mère du peintre Utrillo ou  femme d'André Utter.
Suzanne Valadon s'est formée toute seule  et ne pouvant pas devenir artiste de cirque suite à un accident, elle pose alors  comme modèle auprès de Renoir, de Puvis de Chavannes et de Toulouse Lautrec. A l'époque elle fait aussi  des dessins puis elle  rencontre Degas et devient son élève. Il lui enseigne la gravure et lui permet de développer son talent. Elle fait ses premiers portraits dont celui d'Erik Satie en 1892.
Portrait d 'Erik Satie
En 1894 elle est la première femme à être admise à la Société Nationale des Beaux Arts.
Elle prend pour modèle les personnes de son entourage, sa famille, sa gouvernante. Le trait bleu foncé du contour de ses figures est une caractéristique de Valadon.
Portrait de famille 1912

Femme aux bas blancs 1924

La chambre bleue 1923
Dans la chambre bleue, elle reprend les postures des Vénus alanguies mais c'est en fait un manifeste de la femme libre, sa Vénus est en pantalon, fume et lit des livres.
Portrait d'André Utter et ses chiens 1932
La troisième partie aborde la reconnaissance  des artistes peintres et sculptrices féminines dans le monde des arts. Pour se faire, elles utilisent leurs relations avec des artistes connus, leur compagnon ou compagne, leurs mécènes, leurs  galéristes, et leurs  amis.  Elles se représentent aussi en autoportait. 
Louise Breslau-autoportrait -1912

Emilie Charmy- autoportrait-1923

Portrait de la galériste Berthe Weill -vers 1915-1920 par Emilie Charmy

Marie Laurencin -Autoportrait-1905
Portrait de la collectionneuse d'art la baronne Gourguaud en 1923 par Marie Laurencin
La quatrième partie est consacrée  la place de ces femmes dans les mouvements d'avant garde: pointillisme, fauvisme, surréalisme, cubisme ou peinture abstraite.
Comme Lucie Cousturier (1876-1925) pour le pointillisme. Lucie est l'élève d' artistes néo-impressionnistes comme Seurat ou Signac.
Jardin -Lucie Cousturier vers 1923
Le cubisme chez Juliette Roche (1884-1980). Issu d'une riche famille, elle se forme à la peinture à partir de 1898 dans des ateliers privés à Paris. Elle se marie à l'artiste cubiste Albert Gleizes.

Le porrôn- Juliette Roche 1916
Le surréalisme chez Rita Kernn Larsen (1904-1998). Elle étudie le dessin à Paris à l'Académie Moderne du peintre Fernand Léger. Sa première exposition a lieu à Copenhague en 1934. En  1948, elle délaissera le surréalisme pour l'abstraction.

La promenade dangereuse -1936- Rita Kernn Laren
La cinquième partie pose la question: existe il des sujets féminins?
Au début du 20e siècle, les sujets sont les intérieurs, la maternité, les natures mortes et bouquets mais chacune les travaillera à leur manière car elles peuvent difficillement à l'instar d'un Toulouse Lautrec, aller dans des cabarets pour peindre.
Plat d'étain-1920-Suzanne Valadon
Séraphine de Senlis (Séraphine Louis) (1864-1942). D'origine modeste, cette femme de ménage peint des motifs décoratifs. Elle est morte dans la misère la plus totale à l'hôpital psychiatrique. Un film "Séraphine" lui est  dédiée avec Yolande Moreau dans le rôle principal.
Bouquet de Fleurs sur fond rouge-Séraphine de Senlis-1925-1930
Tamara de Lempica (1898-1980) est représentative du mouvement Art Déco. Elle reçoit l'enseignement de Maurice Denis du groupe des nabis, et d'André Lhote du mouvement cubiste.
Les arums -Tamara de Lempicka 1935
Ces artistes représentent leur époque et notamment l'orientalisme avec ce portrait de femme berbère de Lucie Billet (1862-1906). Elève de William Bouguereau et d' Henri Lucien Doucet.
Femme berbère -Lucie Billet-
La derniere partie traite du nu.
Au déut du 20e siècle, Il n'était pas bienséant pour les femmes de représenter  des hommes  et des femmes nus. 
Camille Claudel a du rhabiller sa valseuse pour pouvoir l'exposer. Quant à Suzanne Valadon, qui réalise des nus à partir de 1893,  elle a du mettre une feuille de vigne à son modèle masculin (où elle se représente avec André Utter)

Suzanne Valadon -Adam et Eve- 1909
Camille Claudel- la Valse

Chana Orloff- l'adolescent -1921-

Chana Orloff -le torse-1912

Georgette Agutte-Femmes à la coupe d'oranges-1910-1912
Après l'expo, une visite du monument s'impose!  Du cloître des hôtes qui est le premier cloître situé à l'entrée et qui comme son nom l'indique accueillait les hôtes de passage, on s'engage dans la nef de l'église (de style gothique flamboyant). Lors de ma visite il s''y tenait une exposition de lego représentant de grands monuments français.
Cloître des hôtes

Nef

La nef avec le jubé au fond
A l'époque , la nef  n'était ouverte aux fidèles que pour certaines grandes fêtes de l'année.
Puis en passant sous le jubé nous rejoignons le choeur.
Le jubé un des rares conservé en France
Au dessus du jubé  le passage de Marguerite qui relie sa chapelle  à ses appartements.
Le choeur et ses stalles

les stalles de chênes
Puis au centre du choeur se trouvent les tombeaux.
Tombeau de Marguerite d'Autriche sur la gauche

Tombeau de Philibert le Beau au centre 
Sur ces deux tombeaux, ils sont figurés deux fois , à l'étage supérieur vivant les yeux ouverts et à l'étage inférieur, morts les yeux clos. La devise de Marguerite figure également sur le fronton de son tombeau.
Tombeau de Marguerite de Bourgogne, mère de Philibert à droite
Puis sur la gauche on pénètre dans la chapelle de Marguerite , et de là nous accèdons à l'étage supérieur qui permettra d'avoir une belle vue sur les vitraux du choeur  et les chapelles.
Chapelle de Marguerite d'Autriche

Choeur vu du haut
Armoiries des familles de Philibert et Marguerite

Philibert
Ensuite nous arrivons dans les appartements de Marguerite où lui est dédié un espace sur sa vie dans les trois pièces de son appartement.
Robe de Marguerite
Ensuite, nous entrons dans une grande salle qui servait de réception et qui abrite des oeuvres de la Renaissance et parmi celles-ci de nombreux polychromes et meubles.
Saint Lettré ou Saint Yves patron des avaocats? 15eme siècle 

Vierge à l'enfant-seconde moitié du XVème siècle -Bourgogne-
Puis la visite se poursuit dans le dortoir des moines où sont abritées les collections de peintures et de sculptures du musée.
Cellule de moine

Cellule de moine (la même mais dans l'autre sens!)

Portrait de Marc Antoine Puvis par son neveu Pierre Puvis de Chavannes-1851
 
Pérouges- Place du tilleul-Utrillo-1936
En 1923, Suzane Valadon achète le chateau de Saint Bernard dans l'Ain pour éloigner son fils de Montmartre et de l'alcoolisme. Utrillo, qui y séjourna souvent, a  sillonné les environs pour y peindre des sites pittoresques.

Nous pénétrons ensuite dans les appartements du Prieur et finissons la visite de l'étage par la salle des porcelaines. Nous arrivons au dessus du cloître des commis de style bressan. Le bâtiment  abritait la cuisine, les fours et la réserve de provisions, une chambre pour les domestiques et une prison.
Les appartements du prieur

Les appartements du prieur(le même dns l'autre sens!)


Jardinière à oignons -vers 1765-

Le cloître des commis avec sa cour pavée et son puits couvert
La visite se termine et nous rejoignons le parvis afin d'aller enfin se restaurer de gâteau de foie et de poulet à la crème!! 
Façade de l'église

A noter quà deux pas, un petit peu plus haut sur l'avenue, se trouve l'hôtel Dieu. Son apothicairerie se visite, mais les mardis et samedis seulement.



Chapiteau du cloître






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