mercredi 23 mars 2022

A la mort , à la vie : Une expo du musée des Beaux Arts de Lyon

Temps pluvieux, temps muséeux!
Le temps n'incitant pas à la balade au grand air, c'est au musée des Beaux Arts de Lyon que je me suis rendue ce 16 février pour voir l'exposition: "A la mort, à la vie, vanités d'hier et d'aujourd'hui". Expo programmée jusqu'au 7 mai 2022.
Mais qu'est ce qu'une vanité me suis-je demandé? On l'entend plus communément sous le terme de ce qui est frivole, insignifiant ou futile. Mais en art, la vanité représente  le caractère éphèmère de la vie sous la forme d'une composition ou d'une nature morte.
Il est vrai que le thème de l'expo ne semble guère réjouissant! Et pourtant il pose la question : quel sens donne t'on à notre vie?

Nigéria, squelettes, 2nde moitié du 20e siècle
L'entrée est à 12 euros et la location de l'audioguide à 1 euro, il vous faudra  environ 1h30 minimum pour parcourir les salles.
Avant de commencer  la visite, quelques explications.
Tout d'abord les symboles des vanités que l'on retrouve dans les oeuvres d'art:
  • Le miroir,  associé à la mort, c'est  un symbole d'illusion, d'orgueil et de vanité.
  • Le sablier, attribut de la mort, il est le symbole du temps qui sécoule et de la fin qui approche.
  • Tout comme la montre qui représente l'inexorable fuite du temps conduisant les êtres mortels à leur fin.
  • Le papillon représente le caractère fugitif de l'existence mais aussi l'envol de l'âme à la mort du corps et la résurrection de celle ci.
  • Les instruments de musique incarnent la vanité des plaisirs terrestres. La musique est parfois considéée comme un plaisir vain et profane suscitant des passions inutiles.
  • Le verre de vin symbolise la vanité des plaisirs terrestres
  • Le livre ouvert représente la vanité du savoir.
  • Le livre fermé symbolise la sagesse spirituelle qui mène au salut de l'âme.
  • Le crâne évoque le caractère transitoire de la vie humaine  et l'abandon de l'enveloppe charnelle.
  • L'écorce de citron pelée en spirale incarne l'écoulement du temps et de la vie,  au long de laquelle l'être se libère de son enveloppe charnelle pour atteindre l'essence spirituelle, représentée par la pulpe.
  • La chandelle qui, en se consumant, représente la brièveté de la vie humaine et des joies de ce monde. 
  • La bulle de savon ex,prime la fragilité de l'existence.
  • Les fleurs symbolisent le caractère éphèmère de la vie et de la beauté, en particulier lorsqu'elles sont représentées fanées ou avec des pétales tombés.
  • La fumée évoque la fragilité et la fugacité de la vie, ainsi  que la vanité des joies terrestres qui se dissipent aussi vite que celle-ci.
La première partie de l'expo s'intitule Entrez dans la danse! 
Et nous sommes accueillis par ces squelettes du Nigéria dans une posture de danse. Car la notion de vanité a commencé par se manifester à travers les danses macabres. Les squelettes incarnant les morts sortis de leurs tombes pour entraîner les vivants dans leurs danses.
J'ai découvert aussi, dans cette première salle, Armand Avrildont un autre tableau figurera dans la partie  des plaisirs qui partent en fumée -le fumeur-. Ce peintre lyonnais est  né à Villeurbanne en 1926, il exerce divers métiers pour avoir l'esprit libre pour penser à la peinture. Il rencontre Pierre Pelloux, artiste lyonnais , Louis Pons  qui l'encourageront à poursuivre son art. Son admiration pour Gaston Chaissac, Jean Dubuffet et l'art africain feront le reste. Peut-être est-ce l'art africain qui feront, qu'à partir de 1968, il récupérera divers objets (pinces à linge, bouchons, capsules, fagots) pour former des compositions.
Armand Avril-1974-
La seconde partie a pour titre les âges de la vie . Tout être depuis son enfance  est voué à disparaître. Mais que fait-on de son existence ? semble dire Cornélis Schaeck dans la représentation de l'intérieur d'un savetier où l'on voit le savetier raccommodant des souliers usés et sa femme endormie à côté de son rouet. Les objets épars au premier plan pourraient symboliser le chemin d'une étape à l'autre de l'existence et les différents âges de la vie incarnés par les figures féminines du tableau.
Cornelis Schaeck (~1628-1662)-Intérieur de Savetier-
Hendrick Gerritsz Pot, peintre néerlandais (~1585-1657) nous montre le dernier âge de la vie dans le tableau femme âgée avec un livre .
Femme agée avec un livre (~1620-1630)
Dans une salle adjacente sont exposées des photos prises par Philippe Bazin (1954) sur des personnes aliénées ou atteintes de maladie, mais cela ne m'a pas plu, même si le sujet est de nous rappeler que nul n'est à l'abri de la madadie.

La salle numéro  3 a pour thème fragile jeunesse
Sont exposées des oeuvres d'un artiste que j'ai aussi découvert,  Eric Dubien (1963), avec son jardin secret. Ses oeuvres traitent de la souffrance des enfants  ou d'adolescents dont le genre assigné à la naissance n'est pas en adéquation avec leur identité.

Jardin secret
Moins contempain, une eau forte de Rembrandt  de 1639 "La mort apparaissant à un jeune couple" symbolise la fugacité de la vie et des plaisirs de la jeunesse face à la mort.
Rembrandt (1606-1669)-La mort apparaissant à un jeune couple
Après avoir longé l'oeuvre d'Erik Dietman ( peintre sculpteur et dessinateur suédois 1937-2002) représentant trente huit crânes humains fixant un petit point sur le mur, nous passons dans la salle  Vanités des Vanités.
Titre : l'art mol et raide ou l'épilepsisme-sismographe pour têtes épilées: mini male head coiffée du grand mal laid comme une aide minimale...
Dans cette salle , beaucoup de tableaux de vanités sous la forme de natures mortes, comme celle de la deuxième moitié du 17ème siècle de Pier Francesco Cittadini (1616-1681- peintre de la période baroque) , où une bonne partie des symboles sont réunis : la montre (la fuite du temps) la bouteille (vanité des paisir terrestre) le crâne (le caractère transitoire de la vie) le livre fermé ( la sagesse spirituelle et par conséquent le salut de l'âme)
Pier Francesco Cittadini (1616-1681)-Vanité
Plus contemporaine comme celle de  Pierre Bohm (1951).
La vanité qui ricane (2010-2015)
ou celle de Jim Dine (1935) peintre graveur sculpteur apparenté au mouvement Néo-Dada, utilisant la technique du fondu et des variations chromatiques. Ces deux oeuvres revisitent  la tradition des vanités en y incorporant des modèles issus d'autres cultures.
Above Fredericksburg (1985)
La cinquième partie traite de la Vanité des arts et des savoirs.
On y retrouve une vanité  de Picasso datant de 1946.
Vanité
Plus classique celle de  Louis Carey (1822-1871).
Science et foi (1865)
ou encore les mangeurs de Ricotta de Vincenzo Campi : rire de la vanité de hommes  plutôt que  d'en pleurer. Il m'a bien plu ce tableau  de par le sujet et de par ses couleurs.
Campi a souvent représenté des scènes de la vie quotidiennes notamment connu aussi pour ses scènes de marché (les poissonniers, la marchande de fruits).
Vicenzo Campi (1536-1591)-les mangeurs de Ricotta-1580
Après une partie méditations où sont exposées des oeuvres dont le sujet est le saint pénitent incarnant le rejet des plaisirs terrestres,  lui succède une partie intitulée des plaisirs qui partent en fumée.
Scènes de cabaret dénonçant la futilité des plaisirs terrestres, la fumée qui s'échappe des pipes symbolisant l'inconsistance de la vie humaine.
On remarquera la peinture de Van Bylert, peintre du siècle d'or néerlandais, faisant partie du mouvement caravagisme.
Quant à David Rijkaert III il a été influencé par David Teniers le Jeune et a peint des scènes d'intérieur (cordonniers, alchimiste, auberges, scènes paysannes).

David Rijkaert III (1612-1661)- la peseuse d'or- 1640

Jan van Bylert (1597-1671)-l'entremetteuse- 1625-1630-

Armand Avril (1926- )- le fumeur-2002
Dans la salle, l'absente de tous bouquets se succèdent des tableaux floraux, la fleur étant un symbole du caractère éphèmere de l'existence. En peignant des fleurs flétries ou cassées , les artistes nous rappellent que les beautés de la nature ne durent pas.
Abraham Mignon (1640-1679)- chat renversant un vase de fleur-

Louis Janmot (1814-1892) - fleur des champs -1845
La salle suivante est intitulée la vie précieuse.
Ici nous allons retrouver des tableaux mettant en scène de la vaisselle, des aliments et symbolisant la vanité des biens et des plaisirs terrestres. Nous nous retrouvons ainsi face à des tables appartenant à de riches convives ou au  contraire à des tables plus sobres qui nous invitent à la modération.
Abraham Hendricksz. van Beyeren (~1620-1690)-la coupe d'argent-

Willem Claez.Heda (1594-1680)- nature morte 1642-

Albert Kauw (1616-1681) - dessert maigre

Sébastien Stoskopff (1597-1657)
nature morte au pain, à la carpe, au baquet et au pot de terre 1630-
L'exposition se termine par la salle intitulée le miroir animal.
Dans cette partie des oeuvres représentant des animaux morts (rappelant que toute existence a une fin), on retrouve les belles aquarelles d'Antoine Berjon (1754-1843), peintre Lyonnais, originaire du quartier de Vaise, renommé por ses natures mortes de fleurs. Professeur de dessin à l'école des Beaux Arts ,  Il y  a formé les dessinateurs d'une fabrique de tissage mise au point par l'ingénieur Jacquard. Il a été également portraitiste de la Société Lyonnaise.
Antoine Berjon (1754-1843)- lapin suspendu (1810)

Antoine Berjon (1754-1843) Coq suspendu (1810)
Plus contemporaine, l'oeuvre de Francis Bacon, carcasse de viande et oiseau de proie. Peintre influencé par Picasso, Diego Velasquez, Nicolas Poussin et Rembrandt.
Ici la carcasse animale évoque pour Bacon la barbarie de l 'existence humaine.
Francis Bacon(1909-1992)- carcasse de viande et oiseau de proie-1980)
Au milieu de la pièce trône une sculpture d'Etienne-Martin(1913-1995): Ecce Homo.  La sculpture est travaillée dans le tronc d'un oranger centenaire déraciné par une tempête en 1989.  L'artiste fait référence au Christ et la sculpture  prend une forme animale en souffrance sous le poids de ses chaînes rappelant que tout être vivant (arbre, homme ou animal) et un être en souffrance et mortel.
Ecce Homo -1993-
L''oeuvre de Nauman (1941-) termine l'exposition. Bruce Nauman est sculpteur et vidéaste. De fait il travaille beaucoup sur le corps humain et ses mouvements et ne se classe dans aucun mouvement artistique. Dans Butt to Butt des parties de corps sont réassemblées sans respect pour l'anatomie naturelle afin de former une composition absurde et dérangeante évoquant la mort de l'animal. J'ai pensé au tableau Guernica en le voyant.
Bruce Nauman- Butt to Butt (Large)-1989-
Voilà la fin de cette  expo qui, comme à chaque fois, m'a permis de découvrir de nouveaux artistes même si le thème n'est pas forcément très gai!



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