mardi 23 août 2022

Envie de lecture ... chapitre 14

Voilà une nouvelle série de mes lectures estivales avec  une carte postale d'été  qui n'a rien à voir avec les livres cités ici  mais qui permet de rêver et de  s'évader tout comme la lecture!
 

Instant de farniente à la Réunion
Vulcano (Iles éoliennes-Sicile)
Les  mille fenêtres de Bérat (Albanie)
Fleur de Balisier de la Martinique
Les pains de Sourami (Géorgie)
Citrons de Stromboli (Sicile)
Maison de Naxos (Grèce)


Robert Galbraith: Blanc mortel
Je retrouve avec plaisir Robert Galbraith et son personnage Cormoran Strike , que j'avais déjà côtoyé dans l'appel du coucou, le ver à soie et la carrière du mal.
Robert Galbraith est le pseudonyme de JK Rowling l'écrivaine d'Harry Potter.
Si vous avez manqué le début de la série: Cormoran Strike est un vétéran de la guerre en Afghanistan ( où il a d'ailleurs  laissé une partie de sa jambe ) et qui, à son retour, a monté son agence de détective. Il a embauché Robin Ellacott qui au fil des enquêtes est devenue son associée.
L'action se situe pendant les jeux olympiques de Londres. Après la carrière du mal où Robin s'est retrouvée dans une situation difficile et fragilisée psychologiquement, nous la retrouvons au début du livre le jour de son mariage  avec Matthew Cunliffe. Pendant ce temps à l'agence un certain Billy vient voir  Cormoran pour lui parler d'un meurtre dont il a été le témoin. Cormoran et Robin décident d'enquêter sur le sujet qui les conduit daans les bas-fonds de Londres, mais en parallèle une  autre enquête les emmène  dans les hautes sphères du Parlement britannique.
Entre les enquêtes, s'entremêlent la vie personnelle des enquêteurs: la liaison épisodique entre Cormoran et Lorelei sa nouvelle compagne ainsi que les relations complexes de Robin et Matthew. Si le dénouement de cette tortueuse enquête se situe à la page 900, la vie personnelle des deux protagonistes est loin d'être aussi claire.
Il y aura donc certainement une suite...

Extrait 1: " le lendemain matin, Robin se réveilla en sursaut avec l'impression d'étouffer, ses doigts crispés sur sa gorge comme pour dénouer des mains invisibles. Elle allait sortir de la chambre quand Matthew se réveilla à son tour et la regarda, désorienté.
"Ce n'est rien, je vais bien ", marmonna t'elle sans lui laisser le temps de parler. Puis elle trouva la poignée en tâtonnant, ouvrit la porte et passa dans le couloir.
Le plus surprenant n'était pas qu'elle ait eu ce genre de crise, mais plutôt qu'elle n'en ait pas eu plus souvent depuis qu'elle avait entendu cette histoire d'enfant étranglée. Robin savait précisément ce qu'on ressentait quand on vous attrapait le cou et qu'on serrait, quand l'obscurité vous envahissait le cerveau et que vous aviez conscience de vivre vos derniers instants."

Extrait 2: "Le lendemain, Strike était d'une humeur massacrante. Pourquoi, nom d'un chien, devait-il se trimbaler à l'autre bout de la ville, un samedi matin, par une chaleur d'enfer, lui, l'associé principal et le fondateur de l'agence, alors qu'il avait trois collaborateurs et une jambe artificielle? fulminait-il en se dirigeant clopin-clopant vers Mile End Park où devait se tenir la marche de protestation. Pourquoi? Parce qu'il n'avait pas de bébé à garder, pas de femme immobilisée par une fracture du poignet, pas de vacances prévues en Andalousie, pas d'anniversaire de mariage à célébrer ce week-end. Et sous prétexte qu'il n'était pas marié, c'était donc à lui de se sacrifier et de renoncer à un week-end de repos pourtant bien mérité."


Jules Verne : le tour du monde en 80 jours
Nous sommes au 19ème siècle le monde des transports évolue : chemin de fer, paquebots, l'ouverture du canal de Suez permettent de réduire les distances.
Le 2 octobre 1872, un gentleman anglais Philéas Fogg engage un nouveau serviteur nommé Passepartout, un  parisien  débrouillard,  à Londres depuis cinq ans. Ce même jour Philéas Fogg comme à l'accoutumée se rend à son club, le Reform Club. Et alors que la discussion tourne autour d'un article du Morning Chronicle sur le vol dans une banque de la somme de 50 000 livres par un gentleman ne figurant sur aucune liste des Sociétés des voleurs d'Angleterre et que ce voleur pourrait rapidement trouver asile loin de l'Angleterre d'autant plus que depuis l'ouverture d'une ligne de chemin de fer en Inde il est possible de faire le tour du monde en 80 jours. Philéas Fogg parie 20 000 livres qu'il fera le tour du monde en 80 jours et qu'il sera de retour le 21 décembre à 08h45 du soi .
Le voilà donc parti avec Passepartout, mais il est poursuivi par l'inspecteur Fix qui pense qu'il est l'audacieux voleur de la banque. Son voyage l'emmènera en Inde puis en Chine, en passant par le Japon et l'Amérique. Bien sûr son parcours sera semé d'embûches.
Une vraie invitation au voyage ce livre! Un régal!

Extrait 1: " A huit heures Passepartout avait préparé le modeste sac qui contenait sa garde-robe et celle de son maître; puis, l'esprit encore troublé, il quitta sa chambre, dont il ferma soigneusement la porte, et il rejoignit Mr. Fogg.
Mr Fogg était prêt. Il portait sous son bras le Bradshaw's Continental Railway, Steam Transit, and General Guide, qui devait lui fournir toutes les indications nécessaires à son voyage. Il prit le sac des mains de Passepartout, l'ouvrit et y glissa une forte liasse de ces belles bank-notes qui ont cours dans tous les pays."

Extrait 2: "C'est à quatre heures et demie du soir que les passagers du Mongolia avaient débarqué à Bombay, et le train de Calcutta partait à huit heures précises.
Mr. Fogg prit donc congé de ses partenaires, quitta le paquebot, donna à son domestique le détail de quelques emplettes à faire, lui recommanda expressément de se trouver à huit heures à la gare, et, de son pas régulier qui battait la seconde comme le pendule d'une horloge astronomique, il se dirigea vers le bureau des passeports.
Ainsi donc, des merveilles de Bombay, il ne songeait à rien voir, ni l'hôtel de ville, ni la magnifique bibliothèque, ni les forts, ni les docks, ni le marché au coton, ni les bazars, ni les mosquées, ni les synagogues, ni les églises arméniennes, ni la splendide pagode de Malabar Hill, ornée de deux tours polygones. Il ne contemplerait ni les chefs-d'oeuvres d'Eléphanta, ni ses mystérieux hypogées, cachés au sud-est de la rade, ni les grottes Kanhérie de l'île Salcette, ces admirables restes de l'architecture bouddhiste!
Non! Rien."

Nicolas Mathieu : leurs enfants après eux
C'est l'histoire d'une vallée dans l'est de la France dans la ville d'Heilange sur  une période de  huit ans en quatre chapitres  (1992-1994-1996-1998) et  dont le titre  est quatre chansons des années 90 : Smells like teen spirit, You could be mine, La Fièvre et I will survive.
C'est durant cette période l'histoire  entremêlée de quatre adolescents Anthony le personnage principal, son cousin, Steph, Clem', Hacine, enfants d'ouvriers, d'immigrés ou de petits bourgeois. Mais aussi l'histoire de leurs parents  dans  cette vallée où les hauts fourneaux sont à l'abandon, où les formations sont sans débouchés et l'emploi portion congrue.
En 1992, Anthony a quatorze ans, on est au mois d'août et il fait chaud. Avec son cousin, ils volent un canoé pour aller sur la plage des culs-nus. Il y rencontre Stéphanie et en  tombe amoureux.
Anthony,  fils d'ouvrier, tout comme Stéphanie qui elle est  issue d'un milieu bourgeois, ne veulent pas de cette vie à Heillange : foutre le camp est leur leitmotiv.
Mais en attendant c'est la drogue, l'alcool, les petits larcins ou les trafics en tous genre qui remplissent leurs journées, les surprises parties ou les bals où tout finit en vrille.. Certes la trame est sombre, mais il y a la rage de vivre, d'aimer, de se griser de vitesse à moto. C'est la peinture d'une époque où des adolescents peinent à trouver leur voie et qui pour beaucoup,  malgré leur espoir de fuite, reproduiront la vie de leurs parents.
Un livre plein de justesse,  fresque sociale et politique, chacun y retrouvera son histoire.

Extrait 1: "Le cousin avait vite grandi, du coup. A seize ans, il savait tondre, conduire sans permis, faire à bouffer. Il avait même le droit de fumer dans sa chambre. Il était intrépide et sûr. Anthony l'aurait suivi jusqu'en enfer. En revanche, il se sentait de moins en moins copain avec les manières de sa famille. Les siens, il les trouvait finalement bien petits, par leur taille, leur situation, leurs espoirs, leurs malheurs même, répandus et conjoncturels. Chez eux, on était licencié, divorcé, cocu ou cancéreux."

Extrait 2: "Hacine mesurait les avantages de sa situation par rapport à celle de ses parents. En dehors même de tout le fric qu'il se faisait, lui n'avait pas à se farcir la durée, la routine, cette répétition dissolvante, du lundi au vendredi, en attendant les vacances, selon un cycle inclassable qui vous menait de la jeunesse au cimetière en un claquement de doigt. Il pouvait se lever tard et glander. Certes la besogne restait toujours identique - il s'agissait à chaque fois  de s'approvisionner, de couper, de conditionner et de revendre- mais les rythmes avaient quelque chose de sporadique et le transport du matos relevait de la grande aventure. On se sentait à la fois entrepreneur et flibustier, c'était tout de même pas si mal."


Fatou Diomé: les veilleurs de Sangomar
" Avec ou sans lune, ils veillent, regroupés autour d'un feu de bois, au centre de l'île de Sangomar; en attendant de poursuivre leur voyage, ils traversent la nuit du Saloum et répondent à ceux qui les réclament sur l'autre rive." C'est ainsi que débute le livre de Fatou Diomé qui raconte l'histoire de Coumba devenue veuve suite au naufrage du Joola qui a emporté au royaume des ombres son mari Bouba père de sa petite Fadikiine. A Niodor, son village, l'île de Sangomar qui lui fait face est considéré comme le lieu de rassemblement de djinns, mais aussi des Pangols c'est à dire les esprits des ancêtres, ancêtre appelés Mâmayinn : les grands parents.
Coumba doit, selon la coutume, entamer un long veuvage chez sa belle-mère. Toute à son chagrin, elle s'accroche à la vie pour sa petite Fadikiine. Pour faire face à ce chagrin,  elle invoque toutes les nuits les veilleurs de Sangomar en espérant y retrouver Bouba "son immortel aimé". Dans cette société animiste où se sont infiltrées d'autres religions comme l'Islam et le Christianisme (que l'auteur appelle les Métamorphosés) et qui imposent leur diktät et notamment dans sa belle-famille  qui lui cherche un mari en la personne du frère de  Bouba qui a déjà deux épouses. Mais c'est sans compter sur le lien qui unit Coumba à Bouba. Une Coumba qui reprend goût à la vie et qui arrivera à rompre ses chaînes. Ce livre également est une belle ode au féminisme, à la place des femmes dans la société sénégalaise. Un beau roman servit par la belle plume poétique  de Fatou Diomé et le portrait d'une  Coumba qui ne peut pas s'effacer facilement de notre mémoire.

Extrait 1: "Il  était une fois, a-t-on coutume de d'entendre, et cette fois-là demeure par la foi des conteurs, qui, pourtant, arrachent des dents depuis des siècles! Il était une fois des voyageurs en escale imprévue au royaume des ombres; bien que généreusement accueillis par les ancêtres sérères, ils avaient le sommeil bref à force de chercher à communiquer avec les vivants, c'étaient les veilleurs de Sangomar, et leur souffle demeure par la voix de Coumba, leur interlocutrice, nuit après nuit, pendant quatre mois et dix jours. La veuve ne parlait pas toute seule, ne délirait pas; et si sa conduite portait à le croire, c'est parce que ceux qui peuplaient ses nuits étaient assez malicieux pour se rendre invisibles à tout autre qu'elle, grâce au sortilège de Sangomar."

Extrait 2: " Cette petite Fadikiine, sa fleur de printemps, le fruit de sa passion, c'était son plus beau souvenir de Bouba, mais aussi, sa messagère du futur. Alors, Coumba en était sûre- parce qu'elle se battrait pour-, sa petite irait à l'école; elle posséderait l'alphabet de leur histoire, ainsi que les chiffres qui datent leur tragédie, autant que les joies d'avant dont elle resterait toujours nostalgique. Coumba écrivait. Sa plume grattait, gravait le marbre de chaque nuit, parce qu'il lui était inconcevable de laisser les vagues de la vie tout emporter sur leur passage. Non seulement elle écumait sa mémoire, mais elle sélectionnait les faits marquants du quotidien et consignait tout, comme on entrepose des provisions. Plus tard,  Fadikiine aurait de quoi nourrir sa curiosité. Le cahier de Comba restituerait à sa fille la couleur de ces terribles jours, dont  la petite n'aurait aucun souvenir personnel, mais qui compteraient indéniablement dans sa compréhension de son histoire."




Romain Slocombe:l'inspecteur Sadorski libère Paris
Eté 1944. Nous retrouvons Sardorski en prison, depuis qu'il a été dénoncé par Jacqueline Perret comme résistant. Fresnes, puis la Santé. Au bout de huit mois, l'Administration le libère en échange d'un rapport sur le transfert  de Georges Mandel  au  château des Brosses vers Vichy. Il accompagne la Milice sous le pseudonyme de Leo Schenk agent de la Sipo SD. Georges Mandel n'ira pas jusqu'à Vichy, il est assassiné par la Milice sous les yeux de Sadorski. Crime commandité par les SS ou par la Milice? La Milice a-t-elle voulu venger la mort de Phlippe Henriot? Sadorski (qui retombe toujours sur ses pattes) est réintégré dans son service et  doit enquêter sur Mansuy le milicien qui a tiré sur Mandel. C'est surtout les quelques semaines avant la libération de Paris qui seront racontées ici. Malgré la défaite qui s'annonce les allemands, la milice et la Gestapo continue de traquer, de déporter, de torturer  les résistants de tous bords, les juifs et les communistes. La confusion règne pendant ses semaines. Sadorski essaie de  tirer son épingle du jeu et de se faire des appuis au cas où! Les policiers qui ont exécutés les ordres de Vichy  et les autres collabos retournent vite leur veste. Sado (après un passage dans les caves de la Gestapo) vivra une parenthèse enchantée avec Monique, l'étudiante qui garde son fis Bernard, mais le couperet (et les ennuis) retomberont vite sur lui.
Romain Slocombe a su restituer l'ambiance de cette période  en mêlant réalité et fiction et en rendant son personnage plus complexe qu'il n'y parait, même si il reste tout de même un salaud. 

Il me tarde de lire le prochain et dernier tome de la série J'étais le collabo Léon Sadorski

Extrait 1 :  "Sadorski  lève les yeux au plafond de l'auto, pendant que ses compagnons reprennent le refrain avec enthousiasme. Lui est pétainiste depuis toujours, ancien combattant, médaillé de la Grande Guerre, où il a été blessé deux fois. Mais ces bas du front l'exaspèrent. S'il partage leurs opinions politiques, l'IPA les considère comme des petits truands, des tortionnaires et violeurs de femmes. Lesquels ne tarderont point à récolter les fruits de leurs forfaits  et de leur bêtise: s'engager dans la Milice en 1944, à l'heure où les carottes semblent carrément cuites pour les Fritz et pour leurs alliés, où les troupes anglo-américaines ne sont plus qu'à 220 km de Paris, équivaut à un aller simple pour le cimetière, voire la fosse commune! Pourtant cela recrute ferme, paraît-il. Mais quand tout sera finit les tribunaux des "libérateurs", les bolchos surtout, ne feront pas de quartier."


Extrait 2 : " Le caïd du rayon juif fume sa gauloise à la fenêtre ouverte, en contemplant les toits, le marché aux fleurs, le grand bras de Seine et, derrière l'ex-théâtre Sarah-Bernhardt, la haute tour St Jacques où tournoient les pigeons. Le ciel est d'un bleu profond, sans un nuage. L'air semble plus étouffant que la veille. Cette fois, l'été est vraiment là! Il pense à Jacqueline enfermée à la petite Roquette...destin vache pour une lycéenne des beaux quartiers! Et à Julie cloîtrée depuis deux ans dans l'appartement au-dessus du fleuve... Il pense à Bauger, son collègue de la BS2, et son seul ami à la préfecture, déporté en Allemagne... A ce crétin de Cuvelier sur son lit d'hôpital... A Hortense Gutkind, à Raymonde Bonnet, à Thérèse Gerst, mortes et enterrées....à Mirla Wassermann, partie de Drancy pour ces camps de Pologne dont personne ne revient ou n'écrit pour donner des nouvelles...
A Gisèle Rollin, la militante communiste, déportée également, dans la nuit et le brouillard... Bref, comme disait Lafont, le malfrat, le gestapache: "Putain de vie de merde!..." Et, dans tout ça, le prodigieux boxon que devient le monde, quel est son avenir à lui, Sadorski?"



Agatha Raisin : Gare aux fantômes- tome 14
Notre Agatha cette fois-ci affronte les fantômes!
Après avoir passé quelques temps à Londres, la voilà qui revient à Carsely. Un nouveau voisin s'est installé dans la demeure de son ex-mari (James Lacey)  qui habitait le cottage voisin. Mais cette fois-ci Agatha n'éprouve plus aucun intérêt pour la gent masculine. Non, non on ne l'y reprendra plus et elle décide de se muer en ménagère accomplie!!
Bon vous vous doutez bien que cela ne va pas durer avec Agatha! Et lorsque son séduisant voisin Paul Chatterton vient toquer à sa porte pour lui demander de l'accompagner chez Mrs Witherspoon terrorisée par des revenants, sa coquetterie, ses tentatives de séduction et sa curiosité reprennent vite le dessus. Puis la vieille dame meurt assassinée, alors de passage secret en interrogatoires, Agathe tente de résoudre l'énigme aidée par Paul et également ses anciens amis, Roy Silver et Sir Charles Fraith (dont la particule lui ouvre bien des portes).
Mais comme d'habitude tout est bien qui finira bien!!

Extrait 1: "Par une journée ensoleillée, elle était allongée dans un transat, soigneusement enduite de crème solaire, ses deux chats, Hodge et Boswell, à ses pied, lorsqu'un "bonjour" hésitant se fit entendre. Agatha ouvrit les yeux. Son voisin était accoudé à la barrière. Une masse de cheveux blancs comme neige couronnait son visage mince, où des yeux noirs pétillaient d'intelligence.
"Oui? répondit Agatha sans aménité.
- Je suis votre nouveau voisin, Paul Chatterton.
-Et alors? Qu'est-ce que vous voulez? demanda Agatha, refermant les paupières.
- Juste dire bonjour.
- Eh bien, c'est fait, trancha Agatha en rouvrant les yeux et lui décochant un regard torve. Et si vous essayiez "au revoir", maintenant?"

Extrait 2 : "Alors comment ça s'est passé? demanda Paul tandis qu'ils s'éloignaient du commissariat.
- Moins terrible que je ne le craignais, parce que c'est Bill lui-même qui m'a interrogée. Mais, oh! Paul, il avait l'air si sévère et si désapprobateur.
-Ce doit parfois être assez problématique pour un policier d'avoir une amie de votre espèce.
- J'espère qu'il n'est pas trop fâché, s'alarma Agatha. C'est le tout premier ami que je me sois fait, je veux dire, depuis mon installation ici, ajouta-t'elle précipitamment, peu désireuse que Paul sache que l'ombrageuse Agatha Raisin n'avait jamais eu d'amis auparavant."


Victoria Mas : le bal des folles
Jean Martin Charcot est un neurologue réputé  pour ses travaux sur l'hypnose et l'hystérie. Il est médecin à l'hôpital de la Salpêtrière. Hôpital  qui fut construit sous Louis XIV en 1656 à l'emplacement d'un arsenal fabriquant de la poudre pour munitions d'où son nom. Au début, c'était surtout un  lieu d'enfermement pour les mendiants puis ensuite  vers 1684 y fut ajouté une prison pour femmes mais n'était pas encore un hôpital et en 1789 elle abritait 10 000 personnes. C'est Philippe Pinel qui, en 1795, y continue les travaux commencé à Bicêtre sur les aliénées.  En 1856 Charcot est affecté à l'hôpital  de la Salpêtrière et en 1882, la Salpêtrière devient une école de neurologie. Charcot est le premier à utiliser la photographie  de patientes en crise pour ses travaux.
C'est pendant cette période que se déroule l'action du livre, nous sommes début mars 1985 et dans une vingtaine de jour aura lieu le bal de la Mi-Carême ou le bal des folles, dernière expérimentation de Charcot, exposition des fous pour démystifier les préjugés,  et où les internées se déguisent et où accourt le Paris mondain.
Victoria Mas nous raconte l'histoire de Louise violée à 14 ans par son oncle, de Thérèse  prostituée qui a poussé son souteneur dans la Seine, d'Eugénie qui parle aux défunts, se  rebelle contre son père et qui se voit internée sans plus de formalités.  C'est aussi l'histoire de Geneviève Gleizes l'intendante et fidèle assistante du Docteur Charcot,  très affectée par la mort de sa jeune soeur, dont le leitmotiv est de ne pas s'attacher aux femmes dont elle a la charge. 
Il n'était pas bon dans ce siècle  d'être une femme car pour les contraindre au silence, elles étaient enfermées sans autre forme de procès.  Un livre  qui donne à réfléchir  sur la condition féminine des siècles passés et sur celle d'aujourdh'ui non seulement en France mais dans le monde entier.

Extrait 1: "Depuis l'arrivée de Charcot  il y a vingt ans, il se dit que  l'hôpital de la Salpêtrière a changé, que seules les véritables hystériques y sont internées. Malgré ces allégations, le doute subsiste. Vingt ans n'est rien, pour changer les mentalités ancrées dans une société dominée par les pères et les époux. Aucune femme n'a jamais la totale certitude que ses propos, son individualité, ses aspirations ne la conduiront pas entre ces murs redoutés du treizième arrondissement. Alors elles font attention. Même Eugénie dans son audace, sait que toutes les lignes ne sont pas à franchir - surtout pas au sein d'un salon rempli d'hommes influents."

Extrait 2: " Elle était enragée et lasse à la fois. Jamais elle ne s'était sentie si désoeuvrée, si abandonnée. Elle qui pensait naïvement, chez ses parents, qu'elle était seule - que son caractère, ses provocations, sa répartie l'isolaient et la maintenait à l'écart d'une famille qui ne la comprenait pas!
Elle était incomprise, peut-être, mais seule, non. Ce n'était pas cela, la solitude. C'était être isolée dans un hôpital pour folles, sans avoir la moindre liberté de mouvement, ni la moindre perspective d'avenir. Surtout, sans avoir personne, absolument personne, qui s'intéressât, de près ou de loin à vous."




Pierre Lemaître  : le serpent majuscule
En ouvrant ce livre, je ne savais pas  si j'allais le refermer de suite  ou si je me laisserais emporter par la tourbillonnante Mathilde et la plume de Lemaître. Devinez!!!
Il s'agit du premier polar écrit par l'auteur et il nous prévient en avant-propos, il n'en écrira plus mais nous offre celui -là  comme un au-revoir au genre.
Dès la première page nous faisons connaissance avec Mathilde, 63 ans encore alerte malgré son poids,  et son chien Ludo un dalmatien qui n'en mène pas large quand Mathilde se met en colère. C'est qu'elle a à faire Mathilde, et elle  ne laisse rien au hasard. Elle doit honorer un contrat confié par Henri. Ce qu'elle fait de main de maître. Ancienne résistante, la voici recyclée en tueuse à gages. Elle est même tellement rodée qu'elle dégomme à tour de bras et en perd un peu la boule . Même la police s'y cassera les dents. Il faut dire qu'elle a de la veine car le commissaire Occhipinti n'est pas bien futfut !
Ce fut un régal et un bon moment passé en compagnie de cette mamie dézingueuse!

Extrait 1 : " C'est un grand dalmatien au regard bête, mais à l'esprit tendre. De temps en temps, il ouvre un oeil, regarde la lourde nuque de sa maîtresse, pousse un soupir. Il n'est jamais totalement en confiance avec elle, elle a des sautes d'humeur, surtout ces derniers temps. Au début, tout allait bien, mais maintenant... Il n'est pas rare qu'il prenne un coup de pied dans les côtes, il ne sait pas toujours pourquoi. Mais c'est un chien sociable, du genre qui s'attache à sa maîtresse et ne change pas d'avis même dans les mauvais jours. Simplement, il se méfie un peu, surtout quand il la sent sur les nerfs. C'est le cas. La voyant trépigner au volant, il se recouche prudemment, il fait le mort.

Extrait 2: "Mathilde emporte toujours ses outils avec elle, même pour les repérages. Pour la Constance, ça a été très utile: on repère et on fait le boulot dans la foulée. Ce n'est pas toujours aussi simple. Parfois, il faut filer la cible des jours et des jours et Mathilde n'aime pas trop ça. Elle est devenue impatiente avec l'âge, et les choses doivent aller bon train."


Arnaldur Indridason : Les fantômes de Reykjavik
Konrad est un policier à la retraite. Mais une amie de sa femme et son mari le sollicite pour retrouver Danni leur petite fille. Il retrouve celle-ci morte dans l'appartement de son petit ami, apparemment d'une overdose. En même temps, il est sollicité par Eyglo, une amie médium, qui lui demande de réouvrir un dossier, celui de Nanna une petite fille de 12 ans morte noyée dans le lac il y a déjà quelques années  et qui revient hanter son esprit.
En fait trois histoires se vivent en parallèle : celle de Danni, celle de Nanna et puis celle des pères d'Eyglo et de Konrad. Tout cela dans  un contexte de drogue, de viols  et de violence qui font ressurgir les fantômes du passé. Konrad mènera ses enquêtes jusqu'au bout, même s'il doit parfois enfreindre les règles. L'auteur nous fait à la façon de Konrad avancer pas à pas et met ses pièces les unes après les autres jusqu'au déroulement final.

Extrait 1 : "J'avais douze ans. J'étais invitée à un anniversaire, deux ans après cet accident. Cette fête avait lieu dans une maison de la  rue Bjarkargata, juste à côté du lac, et je me souviens que je m'y sentais très mal à l'aise. Il m'arrive de voir les défunts. Ca se produit sans crier gare, parfois je ne sais même pas si les gens que je vois sont morts ou vivants. En tous cas, cette jeune fille m'est apparue. Je suis certaine d'avoir vu son fantôme."

Extrait 2: " Konrad se trouvait à nouveau chez les grands-parents de Danni. Il y allait chaque fois à contrecoeur et se serait bien passé de ces visites. Il était fermement décidé à ce que celle-ci soit la dernière, quoi qu'il arrive. Il les connaissait à peine  et refusait d'être le spectateur impuissant de leur détresse. Il éprouvait de la compassion pour ces gens qui traversaient de terribles épreuves, c'était d'ailleurs uniquement pour cette raison qu'il consentait à venir. Il ne comprenait pas pourquoi ils passaient leur temps à l'appeler plutôt que de s'adresser à la police, pas plus qu'il ne parvenait à cerner le rôle qu'ils voulaient le voir endosser dans leur processus de deuil."



Christian Jacq : la pyramide assassinée- La loi du désert -la justice du Vizir
Ces deux  livres font partie d'une trilogie : la pyramide assassinée est  le tome 1, la loi du désert le tome 2, la justice du Vizir, le tome 3. 
L'histoire raconte celle du juge Pazair, un petit juge dans un village non loin de Thèbes, qui est muté à Memphis car recommandé par son ami  et maître Branir. Epris de justice, sa probité lui fera gravir les échelons de l'administration.
L'histoire c'est aussi celle de Ramses II (né vers -1304 et mort vers -1213) troisième Pharaon de la XIX dynastie et qui à chaque printemps doit aller dans la pyramide de Guizeh où se trouve le testament des Dieux qui lui assure sa légitimité : par ce texte le Pharaon reçoit l'Egypte en héritage et doit la garder heureuse et prospère. Il devait donc montrer ce document à la cour et au peuple. S'il ne pouvait le faire il était contraint d'abdiquer. Or des conjurés volent les documents et des objets dans la pyramide.
Le juge Pazair  est amené  à enquêter sur les morts suspectes de cinq vétérans gardiens du Sphinx de Guizèh. Il rencontre:
- Néféret médecin tombée en disgrâce à cause de la vengeance de Nebamon médecin chef de la cour d'Egypte, 
- un ancien ami Souti, amateur de jolies femme  mais   qui s'engage dans l'armée pour aider le juge Pazair dans son enquête et qui tombra amoureux de Panthère une jolie lybienne, 
- Kem, le policier  et son babouin policier,  Tueur
- Kani le jardinier. 
Ceux-là sont ses amis.
Mais d'autres personnages que le petit juge gêne par sa probité et son envie de justice le pursuivront et cherceront à lui nuire:
- Denes l'armateur et sa femme Nénophar, 
- le chimiste Chéchi, 
- Mentmosé le chef de la police, 
- Qadash le dentiste, 
- le Doyen du Porche  qui devant la résidence du souverain reçoit les plaintes des habitants, 
- Bel-Tran marchand de papyrus et sa femme Silkis, 
- le général Asher.
Dans le deuxième tome alors qu'il est sur la piste des conjurés, le juge Pazair est envoyé au bagne, entre-temps il s'est marié avec Néféret. Il s'évadera, et sera l'objet de plusieurs complots. Nommé vizir,  il sera mandaté par le Pharaon lui-même  pour retrouver le testament des dieux. Quant à Néf"ret, elle est nommée médecin chef du Royaume.
Dans le troisième tome , alors que l'étau se resserre autour des conjurés, le juge Pazair est toujours  poursuivi par  le mystérieux "avaleur d'ombres", car les conjurés ne veulent laisser aucun témoin gênant derrière eux. Heureusement Kem et son babouin veillent..
Finalement la justice fera son oeuvre, mais malgré les figures déjà connues de certains conspirateurs, le suspense restera jusqu'aux dernières pages où l'on découvrira qui se cache derrière l'avaleur d'ombres et qui est à la tête du complot. Une trilogie palpitante de bout en bout grâce à la plume de Christian Jacq, qui, dans ce roman historique  nous fait revivre de façon très documentée la vie aux temps des pharaons, ici sous le règne de Ramsès II, son organisation sociale et religieuse.


Extrait 1:  "Une nuit sans lune enveloppait la grande pyramide d’un manteau de ténèbres. Furtif, un renard des sables se faufila dans le cimetière des nobles qui, dans l’au-delà, continuaient à vénérer Pharaon. Des gardes veillaient sur le prestigieux monument où seul Ramsès le Grand entrait, une fois l’an, afin de rendre hommage à Khéops, son glorieux ancêtre ; la rumeur prétendait que la momie du père de la plus haute des pyramides était protégée par un sarcophage en or, lui-même recouvert d’incroyables richesses. Mais qui aurait osé s’attaquer à un trésor aussi bien défendu ? Personne, à l’exception du souverain régnant, ne pouvait franchir le seuil de pierre et se repérer dans le labyrinthe du gigantesque monument. Le corps d’élite affecté à sa protection tirait à l’arc sans sommation ; plusieurs flèches auraient transpercé l’imprudent ou le curieux.
Le règne de Ramsès était heureux ; riche et paisible, l’Égypte rayonnait sur le monde. Pharaon apparaissait comme le messager de la lumière, les courtisans le servaient avec respect, le peuple glorifiait son nom."

Extrait 2: "-Qu'est-ce qui vous amène à Thèbes?
Il eut envie de crier :" Vous Néferet, vous seule!" mais les mots ne sortirent pas de sa gorge. Il était certain qu'elle percevait sa passion, attendait qu'elle lui offrit la possiblité de l'exprimer, n'osait pas briser sa sérénité avec une folie qu'elle désapprouverait sans doute.
- Peut-être un crime, peut-être plusieurs crimes.
Il la sentit troublée par un drame qui ne la concernait pas. Avait-il le droit de la mêler à cette affaire dont lui-même ignorait la nature réelle?"


Extrait : "La chaleur était si écrasante que seul un scorpion noir s'aventurait sur le sable de la cour du bagne. Perdu entre la vallée du Nil et l'oasis de Khargeh, plus de deux cent kilomètres à l'ouest de la cité sainte de Karnak, il accueillait des récidivistes qui purgeaient de lourdes peines de travaux forcés. Quand la température le permettait, ils entretenaient la piste reliant la vallée à l'oasis, sur laquelle circulaient les caravanes d'ânes porteurs de marchandises.
Pour la dixième fois, le juge Pazair présenta sa requête au chef du camp, un colosse prompt à frapper les indisciplinés.
-Je ne supporte pas le régime de faveur dont je bénéficie. Je veux travailler comme les autres.[....]
-Vous n'êtes pas comme les autres.
-Je suis prisonnier.
-Vous n'avez pas été condamné, vous êtes au secret. Pour moi, vous n'existez même pas. Pas de nom sur le registre, pas de numéro d'identification."



Extrait : "- Je souhaite une modification de la hiérarchie médicale, déclara Bel-Tran. Donnons davantage d'importance aux spécialistes et beaucoup moins aux généralistes. Demain, avec l'ouverture de l'Egypte sur le monde extérieur, les spécialistes s'enrichiront facilement et nous les exporterons avec profit.
-Tant que je serais médecin-chef, affirma la jeune femme, nous préserverons la tradition; si les spécialistes prenaient le pouvoir, la médecine perdrait sa vision de l'essentiel: l'être humain dans son entier, l'harmonie de l'esprit et du corps.
-Si vous n'acceptez  pas mes vues, la Double Maison blanche vous deviendra hostile.
-S'agirait-il d'un chantage?"







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