vendredi 1 septembre 2023

Le musée de la Résistance à Lyon

Le musée de la Résistance ou plus exactement le CHRD, le Centre d'Histoire de la Résistance et de la Déportation, se situe au 14 avenue Berthelot dans le 7ème arrondissement de Lyon.
Pour les infos pratiques: accès, billetterie se rendre sur le site  informations-pratiques
Il ya également des parcours urbains proposés.
Le bâtiment a été construit en 1889 pour y implanter l'Ecole du Service de Santé Militaire (ESSM). Il s'agit de la construction de 3 pavillons avec une cour centrale arborée. En 1913 il comprenait 480 logements étudiants.
Centre d'Histoire de la résistance et de la déportation
En mars 1943, l'Ecole est réquisitionnée par cinq sections de la Sipo-SD police de la  sûreté allemande (Sicherheitspolizei und Sicherheintsdienst).
La section IV de la Gestapo, dirigée par le lieutenant Klaus Barbie, et chargée de la lutte contre la résistance et de la traque des populations juives.
C'est dans cet endroit qu'étaient interrogés les résistants et les juifs arrêtés par  la police allemande. Les prisonniers étaient incarcérés à la prison de Montluc. Les caves du bâtiment Larrey ont également été transformées en cellules pour les prisonniers avant leur interrogatoire. Un grand nombre d'exécutions sommaires et de tortures ont eu lieu dans ces bâtiments.
(L'hôtel Terminus était le siège de la Gestapo et la 6ème section de la Sipo-SD était installée Boulevard des Belges.)

Le 26 mai 1944, l'école est détruite par un bombardement allié visant les installations ferroviaires de Lyon la Mouche, la façade du bâtiment sur l'avenue Berthelot est totalement détruite, la Gestapo déménage dans un immeuble place Bellecour.
En 1967, un premier musée ouvre ses portes rue Boileau dans les locaux du Muséum d'Histoire Naturelle.
Le 11 mai 1987 c'est le procès de Klaus Barbie.
C'est le 15 octobre 1992 que le musée sera inauguré dans les locaux de l'ESSM en présence de Jacques Chaban-Delmas (1915-2000) (compagnon de la Libération, premier  ministre sous Georges Pompidou, député et Maire de Bordeaux) et Elie Wiesel (1928-2016) écrivain déporté et prix Nobel de la paix en 1986.
Voilà pour un rapide tour historique concernant le musée. On comprendra donc mieux  la portée symbolique  de son emplacement.

Lorsque nous sommes allés au musée il y avait plusieurs expositions.
Nous avons commencé par la projection des extraits du Procès de Klaus Barbie, où l'on assiste aux déclarations des témoins, c'est poignant et j'avoue que, quand j'en suis sortie, j'étais bouleversée.

Puis nous avons continué par l'exposition sur Madeleine Riffaut, à travers les planches de la bande dessinée Madeleine, résistante de Jean-David Morvan et Dominique Bertail.
Née le 23 août 1924, Madeleine s'est engagée dans la résistance Française à l'âge de 17 ans sous le nom de code de Rainer et dès 1942 effectuera de nombreuses missions. Elle rentre dans les FTP (Francs-Tireurs et Partisans) en mars 1944. Au cours d'une mission en juillet 1944 où elle abat un officier allemand de deux balles dans la tête sur le pont de Solferino, elle est faite prisonnière par le chef de la milice de Versailles et emmenée dans les locaux de la Gestapo où elle est torturée pendant 3 semaines par les allemands puis ensuite pendant 2 semaines par la police française. Echappant de justesse à la condamnation à mort et à la déportation elle est internée à Fresnes mais ne parle toujours pas. Le 19 août elle est libérée suite à un échange de prisonniers. Elle participera aux combats de la Libération de Paris affectée à la compagnie St Just. Son engagement s'arrêtera après la Libération, étant femme elle ne rejoindra pas les forces armées.
Après1945, elle sera journaliste, poète, écrivaine, grand reporter au journal l'Humanité, correspondante de guerre. Elle couvrira la guerre d'Algérie, la guerre du Vietnam.

Et nous avons terminé par l'exposition permanente Lyon dans la Guerre 1939-1945.
Cette exposition nous  permet de voir comment vivait une ville dans la guerre à travers la chronologie et plusieurs thématiques.

Le musée retrace la vie quotidienne des lyonnais notamment avec l'installation de l'armée allemande  le 19 juin 1940  jusqu'en juillet 1940, puis à partir de novembre 1942 jusqu'en septembre 1944 .
En juin 1940 Lyon avait été déclarée ville ouverte par Pétain à la demande d' Edouard Herriot (parti Radical), alors maire de Lyon jusqu'en septembre 1940,  qui avait été lui-même contacté par le préfet Emile Bollaert. Il n'y a donc pas eu de combats.
Le 19 juin 1940,  à 15h de l'après-midi les allemands entrent dans Lyon.
Les allemands à Lyon 19 juin 1940
Dans cette première occupation les allemands réquisitionnent le matériel de l'armée et du matériel civil. Si la Poste est rétablie, pendant cette période  le téléphone et les télégrammes sont interdits.
L' armée allemande quitte Lyon  dans la nuit du 6 au 7 juillet 1940.
Entre ces deux dates, Lyon est en zone libre et devient un lieu de repli et un lieu de résistance.
Des réfugiés viennent de Belgique, du Nord de la France  dès le début du conflit ou encore de l'Est à partir de novembre 1940, et font de Lyon une ville de transit. Des centres sont créés dans les gares de la ville mais un centre d'accueil et de triage des réfugiés est installé dans les locaux du Palais de la Foire près du parc de la Tête d'Or pour pallier au manque de place.
Intellectuels, écrivains  s'installent à Lyon (Elsa triolet, Louis Aragon, Roger Vailland...) ainsi que des journalistes car quelques quotidiens nationaux se sont repliés à Lyon.

Georges Villiers (1899-1982) est nommé maire de Lyon par Vichy en juillet 1941 jusqu'en fin 1942 où il est révoqué par Vichy. Georges Villiers bascule dans la Résistance à l'automne 1942. Il est arrêté le 6 juin 1944 par la Gestapo, emprisonné à Montluc, interrogé par Klaus Barbie  et déporté à Dachau.
Il a remplacé  Georges Cohendy (1886 - 1985 ) jugé trop démocrate  qui a occupé la place de maire après Herriot du 20 septembre 1940 au 19 juin 1941.

En septembre 1940, le préfet Emile Bollaert est remplacé sur ordre de Pierre Laval par Alexandre Angeli (1883-1962) qui à la Libération sera jugé e condamné pour collaboration.

Les  tracts, les premières actions de résistance.

Puis des mouvements de Résistance se forment
Combat, Franc Tireur, Libération, Témoignage Chrétien, l'Insurgé,  le Coq Enchaîné et ils ont leurs organes de Presse.
Le Coq Enchaîné créé par Georges Dunoir et  est imprimé par Henri Chevalier et rassemblent des hommes liés par un même idéal laïque, républicain et même franc maçonnique.
En septembre 1942 une vingtaine de cadres sont arrêtés, d'autres hommes en reprendront la tête comme Jean Fousseret jusqu'à son arrestation en mars 1943 puis  Lucien Degoutte et Louis Pradel qui deviendra maire de Lyon de 1957 à 1976. C'est au café l'Etoile tenu par Antonin Jutard, quartier de la Guillotière, franc maçon et membre du Coq Enchaîné, que se tenaient les réunions jusqu'à l'assassinat de celui-ci le 17 novembre 1943 par la milice près de Limonest. Il est enterré au nouveau cimetière de la Guillotière.
Le Coq Enchaîné n°1 Mars 1942
Le mouvement l'Insurgé est fondé en 1940 à Lyon et le journal est créé en mars 1942. Le mouvement est fondé par Marie Gabriel Fugère (1900-1963) pseudo Sauvaget, issu du Parti socialiste Ouvrier et Paysan (PSOP). Il est arrêté le 10 septembre 1943 à Montpellier et déporté à Buchenwald où il passa 16 mois. Le journal continua jusqu'en 1944.
La propagande de Vichy se manifeste par les affiches et l'organe de presse le Nouvelliste publié de mai 1879 à août 1944. Il a été le concurrent du journal le Progrès.

Numéro du 18 juin 1940
Un faux nouvelliste paraît le 31 décembre 1943, des résistants sont passés dans les kiosques lyonnais et sous prétexte de censure ont retiré le numéro du Nouvelliste du jour et l'ont remplacé par celui-ci qui a été vendu comme un exemplaire normal.
Fin 1941 la résistance s'organise à Lyon. La lutte armée s'amplifie. Des actions de sabotage ont lieu. Les résistants ont utilisés les traboules (réseau de passages couverts entre les immeubles) leur permettant de passer d'une rue à une autre. Elles servaient aussi de dépôt de colis.
Matériel de sabotage
Malheureusement la répression s'organise aussi.
  • 26 septembre 1939 Daladier dissout le Parti communiste, l'Humanité est interdite de parution  et  les élus déchus de leur mandat.
  • En juillet 1940 les juifs d'Alsace ont été expulsés en zone non occupée.
  • Le 13 août 1940  loi sur l'abolition des sociétés secrètes dirigée essentiellement contre les Francs-maçons.
  • La loi du 4 octobre 1940 sur le premier statut des juifs est promulguée par Laval sans demande préalable des allemands et qui permet l'internement des ressortissants étrangers de race juive dans des camps spéciaux. Suite à la promulgation de la loi du 3 octobre, la délégation qui administre la ville fait signer à ses agents une déclaration sur l'honneur de non appartenance à la race juive.
  • Le 9 novembre 1940 est promulgué par le gouvernement de Vichy un décret sur la dissolution des centrales syndicales.
  • Une deuxième loi sur le statut des juifs sera promulguée le 2 juin 1941 qui étend les critères d'appartenance et étend le champ des interdictions professionnelles (politique, fonction publique, administration, armée, finance et banque, publicité, spectacle, radiodiffusion, édition...)
  • Le 20 juillet 1941 le recensement des juifs débute dans le Rhône.
  • Le 22 juillet 1941 la loi relative aux entreprises, biens  et valeurs appartenant aux juifs est promulguée : dans le Rhône 420 entreprises vont être aryanisées. Cette loi permet  au commissariat général aux questions juives créé en mars 1941 de nommer des administrateurs provisoires à la tête de ces entreprises, immeubles .... Ces biens étaient vendus aux enchères au profit du Commissariat général aux questions juives.
Immeuble d'habitation vendu aux enchères
  • Automne 1941 création des SOL Service d'ordre légionnaire par Joseph Darnand, police supplétive du régime de Vichy (rassemblement du 12 juillet 1942 place des terreaux de 4500 SOL)
  • Le 29 juillet 1942 l'accord Bousquet Oberg  sur la coopération  franco-allemande de policiers servira  de base aux déportations de juifs.
  • Le 26 Août 1942 des rafles ont lieu à l'encontre des juifs étrangers: plus de  1000 personnes sont arrêtées et internées au camp de Vénissieux qui sert de regroupement régional sont 545 personnes sont envoyées à Drancy et déportées.
  • La zone libre est occupée par les allemands le 11 novembre 1942, suite au débarquement allié en Afrique du Nord. Le drapeau nazi remplace le drapeau français sur les établissements publics et les bâtiments réquisitionnés. Les horloges sont avancées d'une heure afin que la France soit à l'heure de Berlin, l'heure allemande.
  • Le 30 janvier 1943, la milice française est créée.
  • Le 9 février 1943 une rafle est organisée par les allemands dans les locaux de l'UGIF à Lyon (Union Générale de Israélites de France) 86 personnes sont arrêtées dont 80 seront déportées. Tout comme les 20 et 21 février 1943 une seconde rafle a lieu et 150 personnes sont arrêtées et  déportées.
  • Le 16 février 1943 instauration du STO service de travail obligatoire pour les jeunes gens nés entre 1920 et 1922
  • Le 18 février 1943 la prison de Montluc est réquisitionnée par les allemands, juifs et résistants y seront enfermés avant leur exécution ou leur déportation.
  • De 1943 à 1944,  arrestations, raffles, exécutions et déportation des  résistants et juifs  s'intensifient.
  • Au cours de l'été 1943 les préfectures reçoivent des perforatrices  permettant d'appliquer la mention JUIF sur les cartes d'identités (contrairement à l'encre pouvant être falsifiée).
  • Le 29 juin 1944 700 détenus résistants de la prison de St Paul sont livrés aux Allemands et déportés.
  • Le 11 aout 1944  Les 3 prisons lyonnaises sont surpeuplées. Il faut donc qu'un maximum de prisonniers soit transféré vers l'Allemagne, l'ordre est donné de Paris par le général Oberg. A Montluc  650 détenus ( juifs et résistants) sont rassemblés .Les avec bagages sont les résistants destinés aux camps de concentration et les sans bagages sont les juifs destinés au camp d'extermination d' Auschwitz. Ils sont conduits à la Gare de Perrache pour prendre le train qui les conduira à destination de Drancy et Compiègne. Mais Paris est encerclé et le convoi errera 12 jours au hasard des bombardements, ordres et contre-ordres. Ils arriveront à Strasbourg où les résistantes non juives femmes seront acheminées à Ravensbruck et les résistants non juifs hommes au Struthof, les juifs poursuivront jusqu'à Auschwitz où 128 seront gazés dès leur arrivée.
Scène de déportation en gare de Perrache 1944
  • Le 24 aout 1944 la prison de Monluc est libérée.
Les détenus arrêtés pour un motif politique porteront le triangle rouge, les témoins de Jéhovah le violet, les tsiganes le marron, les homosexuels le rose, au milieu des triangles les SS ajoutent une lettre pour indiquer la nationalité des détenus.
Il existe plusieurs types de camps : les camps de transits, les camps de concentration et les camps de mise à mort.
Les premiers camps d'internements pour les étrangers "indésirables" ont ouvert en 1939 pour accueillir les républicains espagnols fuyant Franco, puis en septembre ce  fut le tour des allemands et des autrichiens fuyants le nazisme, puis des communistes  et des"nomades".
En 1940, les juifs étrangers y sont internés suite aux décrets  sur le statut des juifs. C'est en général une première étape vers la déportation. A la libération ce seront les personnes suspectées d'avoir collaborer qui y seront enfermées. Quant aux Tsiganes ils ne seront libérés qu'en 1946.
En violet zone annexée par le commandement allemand de Bruxelles, en bleu foncé territoires annexés
En gris zone occupée, en blanc zone libre
Le livre des déportés est consultable et où j'ai retrouvé, non sans émotion, le nom de ma grand-tante, arrêtée lots de la grande rafle du 13 mars 1944 à Annecy déportée d'abord dans un camp de transit à Neue Bremm et ensuite à Ravensbruck. Libérée en mai, 1945 elle a été confiée à la Croix-Rouge suédoise.

A la fin de la visite,  le circuit nous conduit à un habitat d'époque et à la presse clandestine de la rue Viala.

Cette presse a été achetée par André Bollier à un imprimeur de Grenoble. Ella a été entreposée dans trois garages lyonnais puis installée rue Viala à Lyon  fin 1943. 
André Bollier, responsable de la propagande pour Combat,  plusieurs fois arrêté en 1942 et 1944 continue son action d'imprimeur en imprimant plus d'un million et demi de journaux et de tracts par mois pour différents mouvements de la résistance. Mais le 17 juin 1944, l'imprimerie est cernée par la Gestapo et de 15 miliciens  en présence de Paul Touvier. André Bollier, blessé, se suicide d'une balle pour ne pas être pris vivant. Il est inhumé au cimetière mliaire de la Doua.


André Bollier

Lyon sera libérée le  3 septembre 1944.



Déportation 1943 - Jean Couty -
Jean Couty s'engagera aux côtés des mouvements chrétiens de résistance.
En 1943, il assiste à une scène de rafle dans le quartier de Vaise.





Sources
Site du musée https://www.chrd.lyon.fr/
Site AJPN AJPN Anonymes, justes , persécutés durant la période Nazie
Lyon pendant la seconde guerre mondiale Wikipédia
Site la bataille socialiste https://bataillesocialiste.wordpress.com/
Site musée de la  résistance en ligne https://museedelaresistanceenligne.org/
Site BNF Gallica
Site Le Maitron dictionnaire des fusillés guillotinés exécutés  le Maitron


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